Par opposition aux étrangers, c’est la qualité de la personne humaine qui jouit et exerce des droits civils et politiques dans une communauté politique donnée. Le citoyen partage avec cette dernière une communauté de destin et d’intérêts. On peut être citoyen de naissance ou citoyen par acquisition d’un pays. Parfois, le citoyen d’un pays peut être en situation de plurinationalité. Toutefois, pour occuper certains postes politiques très haut placés dans la structure de l’Etat, ce citoyen pourrait être appelé à renoncer à ses autres nationalités comme gage de sa loyauté envers le pays qu’il s’apprête à servir et afin d’éviter tout imbroglio diplomatique entre les pays dont il est ressortissant. Ce fut le cas par exemple de son Excellence la très honorable Michaëlle Jean quand elle devait accéder à la fonction de Gouverneure générale et de Commandant en chef du Canada, en 2005.1

L’article13.a de la version initiale de la Constitution du 29 mars 1987 dispose « la nationalité haïtienne se perd par la naturalisation acquise en pays étranger » Plus loin, l’article 15 dispose : « la double nationalité haïtienne et étrangère n’est admise dans aucun cas » (ibidem).

L’affaire Dumarsais Siméus

Dans un arrêt du 11 octobre 2005 de la Cour de Cassation de la République, la plus haute instance judiciaire du pays, il a été fait injonction au Conseil électoral provisoire (CEP) d’ajouter le citoyen Américain d’origine haïtienne Dumarsais Siméus sur la liste des candidats agréés pour la présidentielle de 2006, en dépit du fait qu’il reconnait détenir un passeport américain. Seulement quelques heures après cette décision “inédite”, cinq (5) Juges de la Cour de Cassation ont été mis à la retraite par arrêté présidentiel, signé par le Président provisoire de la République Boniface Alexandre, issu lui-même de la Cour de la Cassation à titre de Juge. Il s’agit des Magistrats Michel Donatien, Djacaman Charles, Raoul Lyncée, Luc Fougère, Alix Germain. L’ancien Juge devenu Président provisoire, interprétant la décision de ses anciens pairs, se disait-il que la Cour “aurait erré” ? C’est un débat qui divise encore la communauté des juristes en Haïti. Ce qui est certain, Monsieur Dumarsais Siméus n’a pas pu être candidat à la présidence, malgré l’arrêt de la Cour, en raison de l’interdiction de principe de la double nationalité en Haïti.  

L’affaire Ultimo Compère

Ultimo Compère, un Sénateur de la République, élu par le Département du Centre, soupçonné d’avoir aussi la nationalité américaine, aurait pris la poudre d’escampette en 2008, fuyant le pays, sans avoir informé le bureau du Sénat de la République, au lendemain de son audition par la Commission spéciale du Grand Corps sur la nationalité, selon le président du Sénat, Kelly Bastien.2

L’affaire Rudolph Henry Boulos 

Le Sénateur du Département du Nord-Est, Rudolph Boulos, Haïtien né aux Etats-Unis, a dû démissionner le 18 mars 2008 de son poste de Sénateur, laisser le pays, à la suite de la publication d’un rapport de la Commission spéciale du Sénat de la République sur la nationalité.3

  1. Michaëlle Jean est née à Port-au-Prince, en Haïti, le 6 septembre 1957. Elle est entrée au Canada en 1968 avec ses parents fuyant le régime des DUVALIER. Elle est devenue Gouverneure générale du Canada le 27 septembre 2005. Par voie de décret ministériel, elle a été libérée de son allégeance à l’égard de la France, le 23 septembre 2005. Voir Journal officiel de la République française, NOR : SOCX0509046D, Décret du 23 septembre 2005 portant libération des liens d’allégeance à l’égard de la France, https://www.legifrance.gouv.fr/download/pdf?id=u0KhWQh_zHpNR5r-fOLeJwLEk6F_o71rxo6evWmRe30= ↩︎
  2. Interrogations sur le voyage incognito du sénateur Ultimo Compère – METROPOLE ↩︎
  3. Le sénateur « empêché » Rudolph Henry Boulos (lenouvelliste.com)  ↩︎

By Destin Jean

Spécialiste en droit public et droit international des droits de la personne - Avocat au Barreau de Port-au-Prince

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